Trahi par son pénis: la médecine au service de la police

Daniel Renaud
03 Février 2009
La Presse

Une première au Canada: pour renforcer sa preuve contre un pédophile montréalais qui a agressé son propre fils de deux ans, la police a fait
appel à un médecin pour examiner le sexe du suspect et le comparer à des photos que celui-ci avait fait circuler sur Internet, a appris
RueFrontenac.com.

La police de Montréal a fait appel à un médecin pour examiner le sexe d'un pédophile. Photo reconstitution Martin Bouffard

Sur les photos diffusées dans le Web par l'homme de 44 ans, on reconnaît la victime et on peut voir en avant-plan la main gauche d'un homme qui tient son pénis en érection. Pour tenter de démontrer que le sexe est bel et bien celui du suspect arrêté à Montréal le 20 novembre dernier, les enquêteurs du Module de l'exploitation sexuelle des enfants de la police de Montréal ont demandé et obtenu un mandat le 20 janvier dernier pour qu'un médecin examine l'organe génital de l'accusé, ce qui est une première au pays.

Le sexe apparaissant sur les photos comporte trois marques distinctives, soit une rougeur, une cicatrice de circoncision en forme de W et un grain de beauté.

Les policiers ont fait appel à l'un des urologues les plus réputés du Canada, spécialiste des circoncisions, qui a examiné l'accusé au Centre de prévention Rivière-des-Prairies quelques jours après l'obtention du mandat. Un policier a pris des photos lors de l'examen. "Les photos devront être prises dans un endroit à l'abri de tout regard. Les clichés devront être gardés de façon confidentielle sans aucune publication", peut-on lire sur le mandat.

Il est aussi noté que l'accusé sera informé "du pouvoir de l'agent de la paix, ou de celui de toute personne agissant sous son autorité, d'employer la force nécessaire pour l'exécution du mandat".

Selon nos sources, l'examen aurait permis d'établir que le sexe apparaissant sur les photos est bel et bien celui de l'accusé. L'homme devait subir son enquête pour remise en liberté le 27 janvier dernier, mais ces nouveaux éléments ont fait en sorte que la cause a été reportée au 23 avril.

Arme de choix

"Dans les cas d'agression sexuelle, le pénis devient l'arme de choix pour les agresseurs, un peu comme le fusil pour d'autres criminels. Enfin, au
Québec et au Canada, on utilise tous les moyens pour identifier un suspect", affirme le journaliste Julian Sher, auteur du livre Un enfant à la fois, sur la lutte des policiers contre les cyber-prédateurs.

"Tout ce qui peut aider à reconstituer des éléments de preuve, c'est une bonne chose. Tu ne fais pas mentir la médecine", renchérit le criminologue Philippe Bensimon, spécialiste des cyber-prédateurs, selon qui ces méthodes policières ont été utilisées et ont donné des résultats aux États-Unis et en Europe.

À noter que les policiers ont également obtenu deux autres mandats pour le moins inusités dans cette affaire. Le premier visant à permettre à un
chirurgien plastique de comparer la main gauche apparaissant sur les photos et celle de l'accusé, et l'autre visant à saisir chez le prévenu une paire de jeans que, croit-on, l'homme porte sur les photos.

Pas au bout de ses peines

RueFrontenac.com a également appris que l'homme, qui est actuellement accusé ici d'agression sexuelle, production et distribution de pornographie juvénile, pourrait également faire face à des accusations aux États-Unis.

En examinant son ordinateur, les policiers spécialistes de la cyber-criminalité de la police de Montréal ont en effet trouvé pas moins de
2928 pages de registre de clavardage entre le suspect, qui utilisait un pseudonyme, et d'autres usagers qui mentionnent eux aussi qu'ils agressent
leurs propres enfants ou des enfants proches d'eux.

"Les informations contenues dans ces textes seront fouillées davantage par notre bureau (Module de l'exploitation sexuelle des enfants-SPVM) ainsi que par nos collègues policiers dans les juridictions concernées", peut-on lire sur le mandat.

Selon nos sources, la police américaine serait particulièrement intéressée par cette affaire parce que l'accusé aurait incité, dans ses conversations
électroniques, des individus à agresser leurs enfants.

Lors des sessions de clavardage, l'homme envoie des images à d'autres usagers. Il affirme également qu'il possède des CD-ROM qui contiennent du matériel illicite et qu'il les cache pour ne pas que sa femme les trouve.

Dans les conversations, il y a également mention que le suspect aurait agressé d'autres enfants que son fils.

Dans son ordinateur, 135 images de pornographie juvénile ont été trouvées, dont neuf sur lesquelles son fils apparaît.

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